Edmond Rostand, Cyrano de Bergerac, II, 6

pi�ce de 2.362 vers

 

introduction :

La pi�ce d�Edmond Rostand est pr�sent�e le 28 d�cembre 1897 au th��tre de la porte Saint-Martin et s�ouvre, de fa�on d�concertante, mais fort habile, sur une� sc�ne de th��tre, celui du th��tre de l�h�tel de Bourgogne. Le h�ros �ponyme, apr�s la repr�sentation avort�e de la Clorise en 1640 (alors que la premi�re de cette pi�ce date en fait de 1631 dans le m�me th��tre ; nonobstant, vu la pr�sence de l�Acad�mie et de Corneille, on peut penser que Rostand entendait �voquer une premi�re), et son duel avec le vicomte de Valvert, mais avant son combat contre les cent sbires r�unis contre Ligni�re par le comte de Guiche, a appris de la du�gne de Roxane, � la sc�ne 6, son d�sir d�un rendez-vous secret. De ce fait, Cyrano se retrouve � l�acte II dans la r�tisserie des po�tes, lettre d�amour r�dig�e sous son pourpoint (Rappeneau la lui fait r�diger dans l'arri�re-boutique de Ragueneau), chez � le p�tissier des com�diens et des po�tes � (selon Lign�re), alias le m�me� A l�arriv� de la du�gne, il �vacue cette importune en la chargeant de choux � la cr�me et d�autres g�teaux. Et cette gourmande f�rue de gourmandise de s��clipser rapidement pour les consommer en catimini (m�me si elle reviendra trop vite au v. 200, pour �viter en fait � Cyrano de se trahir en donnant une le�on d�amour � notre pr�cieuse, du haut de sa sup�riorit�, et de m�le, et d�Intellectuel)

(Lecture)

sans les didascalies ni la mention des intervenants dans ce dialogue.)

(M�thode) nous ferons de ce texte une �tude th�matique en deux volets puisque ce passage nous para�t particuli�rement int�ressant de par les deux aspects suivants : il s�agit d�un rendez-vous cens� �tre amoureux, d�sir� depuis longtemps par l�un des deux partenaires. Mais Rostand sait jouer ici et sur le ressort path�tique, et sur le comique : ce m�lange des registres est constant dans cette pi�ce�

I) Un rendez-vous galant pour un aveu longtemps report�:

L'intimit� entre les deux suppos�s partenaires est marqu�e par le fait que la du�gne se retire. Le compliment bien tourn� de Cyrano sur 3 vers nous met dans l'atmosph�re privil�gi�e, intense, de cette rencontre, seule � seul: �vous, me�: il s'agit de recevoir une parole (�pour me dire�), suite � une d�marche: �Vous venez�, cette derni�re expression en interpellation respectueuse en d�but d'alexandrin, comportement peu habituel chez une jeune fille, m�me en compagnie de sa du�gne: �jusqu'ici�. Et Cyrano jouit profond�ment de ce moment, vu la tournure religieuse donn�e � cette entrevue: intense avec �tous�; exceptionnelle avec �instant/instants�, avec le mot �b�ni� � la fin de l'alexandrin. Ce, � la demande de la jeune fille, comme le rappelle implicitement Cyrano. La d�marche est peu commune � l'�poque, nous l�avons d�j� �voqu�, et il faut des circonstances exceptionnelles pour ainsi d�roger aux us et coutumes r�gissant les relations entre hommes et femmes: le principe est que l'homme propose et la femme dispose. c'est ce que rappelle le deuxi�me vers. Notons que le registre est lyrique, marqu� par l'effusion retenue, comme le marquent le t�tram�tre du v. 145, puis le rythme 1/2/3 avec la di�r�se: ou-bli-er suivi derechef de 3/3 puis d'un t�tram�tre. La th�matique courtoise est de rigueur, avec la diff�rence entre l'aim�e divinis�e cens�e vaquer � de hautes pr�occupations (�cessant d'oublier�), et ma�tresse en fait de la situation, et l'amant - ici, en fait, l'amoureux - [rappel: au XVII�me, l'amant aime et est aim�, sans pour autant poss�der l'objet de son d�sir, tandis que l'amoureux aime sans �tre aim�] par d�finition humble: cette distance est traditionnelle].

La didascalie montre que nous sommes dans le cadre de ce rendez-vous galant: on n'affiche pas, bien s�r, ses sorties et ce n'est que dans l'intimit� que l'on se d�voile, ici d�masque puisque Roxane sort incognito (cf. le voile ailleurs, chez nous; le ch�le port� dans les �glises jusqu'aux ann�es cinquante, voire la voilette jusque vers cette m�me �poque), de m�me que la mimique amen�e par la pudeur f�minine: �baissant les yeux�, puisque recevoir un mari implique l'accomplissement du devoir conjugal... Au reste, ce mouvement des yeux �quivaut � un acquiescement � la question sur de Guiche. Au reste, n'y faut-il pas voir une subtile tentative pour pousser Cyrano � s'attaquer aussi � de Guiche? D�barrass�e de l'homme de main, elle pousse � �liminer aussi l'�minence grise... Quoi qu'il en soit, la r�pugnance physique, pour ne pas dire physiologique, de Roxane est soulign�e par ses r�ticences (les points de suspension, car la phrase a du mal � se r�aliser...)

Rappelons que ce rendez-vous galant se situe dans un cadre h�ro�que, au sens moderne du terme, et non pas au sens litt�raire (au XVII�me: concernant au minimum la haute noblesse): �fait mat� renvoie certes au jeu d'�checs - un jeu de nobles - mais le terme mat signifie bien mettre hors de combat (tuer en fait, cf. matador: qui tue les taureaux). La Dame est sensible au courage de Cyrano: � brave jeu d'�p�e �. Notre h�ros du jour, - ou d'hier! � Je me suis donc battu �- fait sa cour: il sait tourner le compliment, avec une antith�se o� l'accent des deux adjectifs retombe sur les noms en opposition � nez, yeux �... Notons que la mise au premier plan, m�me s'il est ni�, du d�faut physique, n'est pas d�ni�e par Roxane, alors que les amoureux, quand ils se rencontrent, font plut�t assaut de compliments...

Les deux personnages semblent bien sur la m�me longueur d'onde, comme l'attestent les allit�rations en fricative abondantes entre 153 et 155.

S'ensuit une �vocation de l'enfance o� nous retrouvons le charme du pass�, avec des rapports dignes de Paul et Virginie. Le � presque fr�re � est d'une ambigu�t� subtile. C'est bien le vert paradis des amours enfantines cher � Baudelaire qui d�file sous nos yeux. Et la nostalgie de cette vie commune sourd profond�ment dans le passage, chacun pr�figurant son propre r�le: � les �p�es � pour Cyrano, � les poup�es �, les falbalas donc, pour Roxane... Cette �vocation des souvenirs d'enfance redonne � cette derni�re une fra�cheur certaine, car les compliments alambiqu�s des marquis l'ont rendue bien artificielle (Acte I, sc. 2, v. 125 - 6). Et cet artifice se retrouvera dans son comportement � l'�gard d'un Christian empot�, incapable de dire l'amour, � l'acte III... Rappeneau supprime en fait ces vers, pour �viter le retour en arri�re � flash back au cin�ma : le faire verbalement serait contre-productif� Ici, nos deux personnages semblaient bien pr�destin�s l'un � l'autre. Roxane en profite pour minauder: �j'�tais jolie alors�. Roxane cumule pour Cyrano toutes les images possibles de la femme: la Dame (152), la s�ur (155), la cousine pendant les vacances (v. 157) - � l'�poque pour fuir les miasmes de la capitale, l'amie d'enfance (v. 163), la maman (v. 165), avec l'insistance de Cyrano en 171. Il est r�v�lateur qu'au v. 334 de l'acte IV, Cyrano avoue qu'il l'adore alors qu'elle sert de cantini�re, ou plut�t de m�re nourrici�re aux... cadets! � Arras... Notons que, pendant la suite de la sc�ne, du v. 167 � 185, Roxane lui tient la main, comme le ferait une amante, m�me si elle n'en semble gu�re troubl�e: il n'y a qu'un passage au tutoiement au v. 169, en tout bien tout honneur, puisqu'il s'agit seulement de remontrances, dans le droit fil de celles de l'enfance, o� il n'y avait bien s�r aucune ambigu�t�. Ceci rappelle des sc�nes de roman de cape et d'�p�e dans lesquelles l'h�ro�ne soigne son mousquetaire bless�, et le r�conforte: v. 172. La suite est dans le droit fil des romans d'amour, m�me si c'est habituellement l'homme qui tient plut�t ce genre de propos... La description que fait Roxane est celle, classique, d'un amoureux transi, un amour de loin, pour reprendre les troubadours: v. 181. Le rendez-vous galant s'oriente donc vers l'aveu, difficile: de courtes phrases. Hach�es : v. 177, avec la r�it�ration du: � j'ose �, red�clar�, car, justement, l'aveu est d�licat. Dans la tradition romanesque, on n'avoue jamais directement le nom de la personne aim�e, et c'est sur cet interdit que repose le sel de cet aveu, qui s'en trouve report�; les r�actions physiques de Cyrano montrent combien, malgr� sa ma�trise, il est emport� par l'illusion: les � ah! � qui scandent les diff�rentes informations - assez anodines et somme toute valables pour beaucoup d'amoureux au d�but de la relation - montrent combien notre ma�tre des mots (cf. sa le�on de vocabulaire lors de sa c�l�bre tirade du nez � l'acte I) est troubl�, comme sa main qui en fr�mit (v. 183). Roxane tourne autour du pot, ce qui ne peut que leurrer Cyrano. Elle est toujours g�n�e d'avouer. Elle tente m�me de tourner � la plaisanterie une co�ncidence, comme si elle �tait anodine, alors que c'est bien la seule raison pour laquelle elle rencontre seule � seul Cyrano: les arr�ts: �Et (synd�se artificielle), figurez-vous, tenez, justement, oui, mon cousin�, n'apportant aucune information, font partie des proc�d�s habituels pour reculer l'�mission d'un message. La difficult� de l'aveu s'incarne dans l'abondance des pauses phono-s�mantiques ainsi que dans le rythme extr�mement saccad� des v. 184 - 185. Les co�ncidences surabondent donc et se rapprochent de plus en plus de Cyrano, qui ne fait pas la part de l'illusion amoureuse: l�anonyme Christian rel�ve de tous les adjectifs dont l'affuble en kyrielle Roxane, aveugl�e par sa passion, m�me si le terme d' �intr�pide � est plus sujet � caution: ce n'est pas lui qui d�fie - mais en a-t-il le temps? En v�ritable h�ros corn�lien, les devoirs dus � l'amiti� avec Ligni�re (et il y a urgence vitale!) passent avant ceux de l'amour - Valvert. Qui d'ailleurs, d'apr�s Ligni�re, devrait tuer Christian... L'aveu tant esp�r� par Cyrano se retourne brutalement contre lui, avec le terme �beau�, cf. acte IV, � partir du v. 478.

Obs�d�e, aveugl�e par son amour, Roxane ne se rend compte de rien. Et l'aveu devient celui d'une passion hautement affirm�e: le �enfin� montre que ce sentiment est assum�, parfois avec un petit c�t� but� assez enfantin... Il s'agit d'un coup de foudre: seuls les yeux se sont parl�s, ce qui ne peut faire l'affaire de Cyrano, homme de parole et de paroles, �crites (cf. la d�claration d'amour cach�e sous son pourpoint, toutes celles qu'il �crira � Roxane, lors du si�ge d'Arras) ou parl�es - sauf pour avouer son amour � Roxane, t�tanis� qu'il est - nous dirions, nous, de fa�on plus moderne, complex� qu'il est par sa laideur. Ou plut�t la pr�sence de son nez pro�minent... Cyrano est un bas-bleu en ce qui concerne les relations amoureuses; subtil, il n'imagine pourtant pas comment Roxane peut conna�tre celui qu'elle pr�sente comme un inconnu. Mais Roxane, malgr� son c�t� ing�nu, sait d�j�, en fine mouche, comment s'y prendre pour recueillir les informations qui la touchent. Elle s�av�re un peu g�n�e de ce type d'aveu � son cousin et se montre, avec les points de suspension et le pronom ind�fini, extr�mement allusive. C'est maintenant � Cyrano de s'enqu�rir et de pousser Roxane � l'aveu, un autre que celui esp�r� au v. 147... pour mieux la confronter � la r�alit�: il prend alors le r�le d'un sage philosophe, conscient des limites humaines et les regrettant: � vite, vite, on lance son c�ur �, comme si c'�tait un jeu, alors que pour lui, c'est vital, puis le comportement protecteur de l'adulte: � mais, ma pauvre petite �... pour terminer par celui de p�re: � ma pauvre enfant �... Au moment o�, par jalousie ou pour prot�ger Roxane d'elle-m�me, il va sans doute devenir odieux, l'intervention intempestive de la du�gne lui remet les pieds sur terre, et lui permet d'attaquer sur le terrain o� il est le plus � l'aise, celui du bel esprit - Cette id�e sera reprise dans le film Ridicule; en fait, quelle que soit l'�poque, toute cour g�n�re ce type de comportement artificiel, pr�nant l'excellence de l'esprit caustique sur les capacit�s concr�tes. Cyrano, suivant un rythme saccad�, n'h�site pas � la mettre en face de sa contradiction: � Ma pau/vr(e) enfant/ vous qui// n'aimez/ que beau/langag(e) �, il poursuit par un t�tram�tre, en outrant l'insulte: � profane, sauvage �, comme pour �tre plus clair. La r�ponse de Roxane montre combien son jugement est occult� par sa passion, avec le b�gaiement d� aux dentales. Malgr� les efforts de Cyrano, Roxane reste accroch�e � ses affirmations p�remptoires, au rebours de l'�vidence: elle commence par une d�clarative objective: �tous les mots qu'il dit sont fins� (notons que ce ne sera plus le cas dans l'acte III, le baiser de Roxane, o� elle cong�die sans m�nagement le malheureux Christian pour manque de bel esprit, et notre pauvre niais n'y peut mais), dont elle d�truit les fondements ensuite: �je le devine!� C'est bien un aveu d'aveuglement passionn�. Elle fait pi�tre figure face aux remarques caustiques de son contradicteur, qui retourne � chaque fois, dans cette logomachie, les constatations de Roxane: v. 205, puis 207, avec les deux d�n�gations de Roxane qui s'ach�vent sur son: � oui �. Roxane ne peut lutter, d'o� sa r�action presque hyst�rique indiqu�e par la didascalie (une des rares de ce passage, car le rapport entre les deux personnages est direct et si intense qu'il est inutile de pr�ciser le jeu des acteurs:  tout professionnel sait comment, dans ce type de sc�ne, proc�der, et Rostand ne risque pas d'�tre trahi!) �frappant du pied�, comme caract�rielle, avec l'outrance de l'expression: �eh bien! j'en mourrais, l� o� le � l� � r�sonne comme un � na �! Face � ces gamineries et ce d�cha�nement presque haineux vis-�-vis du contradicteur, il n'y a rien � faire, et Cyrano se sent inutile: il d�sire seulement savoir � quoi ou � qui attribuer sa profonde d�convenue qui, � ses yeux, est le comble du ridicule. On sent une d�ception lourde de menace, comme chez Pyrrhus dans Andromaque de Racine (209 - 210): l'aveu va-t-il se terminer sur une rupture? L'angoisse de Roxane est logique et le fait d'�tre � gascon � r�sonne presque comme une insulte dans sa bouche, alors qu'elle est bien, elle aussi, issue de cette province - et elle a le combat dans la peau, comme l'atteste son comportement de passionaria avant la lettre lors de l'acte IV. Le Gascon serait �touffant? � Tous, tous �. Cyrano reprend le m�me d�terminant, avec l'insulte: � tous les blancs-becs �. Le tremblement, la crainte pour l'autre est bien la marque de l'amour. Un tel aveu direct, sans fard, ne peut qu'irriter Cyrano qui semble songer � se d�barrasser de ce jeune importun. Elle ne reprend pas l'insulte, elle ne peut s'y opposer car elle a besoin de l'alliance de son cousin, et de sa lame: le duel, la veille, dans l'h�tel de Bourgogne l'a int�ress�e, mais pas dans le sens o� Le Bret l'a interpr�t�! Le �j'ai song� permet de flatter l'ego de Cyrano: il a frapp� Roxane... Et nous comprenons mieux, vu les deux adjectifs, pourquoi Cyrano accepte de d�fendre le �petit baron� (admirons le coup de Jarnac du terme: � petit �) : en fait, Roxane fait appel en Cyrano � son sens du panache: � invincible, grand �, par opposition au � coquin �: Valvert, � aux brutes �: sans doute pas les agresseurs de la tour de Nesle, mais toute la foule du parterre... Cyrano, le H�ros vainqueur comme une R�v�lation, une �piphanie: � vous nous appar�tes �, avec ce pass� simple sophistiqu�, et � combien rare en fran�ais! Qui vaut le � mour�tes � de Racine dans Ph�dre� Oui, Cyrano est un �tre d'exception, avec le t�tram�tre du v. 219.  Et Cyrano sait maintenant, gr�ce � Mlle de Scud�ry et � sa carte du Tendre dans la Cl�lie, que, s'il n'a pas droit au Tendre sur Inclination, le Tendre sur Estime lui est assur�, et qu'il pourra se targuer du Tendre sur Reconnaissance... Tendue par l'attente de la r�ponse � sa demande, Roxane en perd son fran�ais: certes, �le lui� en extraposition emphatique, est bien venu, mais que faire de la proposition qui suit? Face � l'angoisse profonde de celle qu'il aime, Cyrano c�de, aussi pour les raisons tactiques que nous venons d'�tudier. Et la r�compense vient imm�diatement, en forme d'effusion, avec le mart�lement de l'amiti� (223), ami (224), aime bien (226), je vous aime (229), amis (231), avec le compliment final: �quel courage�, soulign� par le surench�rissement final de Cyrano. L'allusion � la tour de Nesle avant de se quitter est blessante, puisque, d'apr�s la didascalie, Roxane s'en enquiert distraitement... sans oublier l'objet de ses pens�es: �dites-lui qu'il m'�crive�... Et le rendez-vous galant de s'achever donc sur un rendez-vous �pistolaire, avec le rival�

II) ce qui nous am�ne � notre deuxi�me th�me, car un tel final ne manque pas de sel: ce passage s'av�re tragi-comique:

Path�tique :

de par la tension induite par celle m�me de Cyrano, qui attend, bien s�r, l�occasion favorable, tout au long de cette sc�ne prenante, pour remettre sa missive�

de par l'incompr�hension manifeste entre les �tres, patent ici... La souffrance de Cyrano, son sacrifice personnel accompli se marquant par les � oui, oui �, apparemment inaudible, de simples acquiescements formels,

face � l'�gocentrisme sans calcul, en toute simplicit�, de Roxane, qui se montre fort peu fine mouche, tellement elle est s�re de son Cyrano... Aucune trahison de sa part n'est possible: elle se sent en compl�te s�curit� avec lui...

Et c'est la raison pour laquelle elle ne l'aime pas... malgr� ses redites�

Comique :

en reprenant le texte en son d�but, le remerciement de Roxane s'av�re assez amusant: elle est d�barrass�e d'un importun et un tel service m�rite qu'on s'y arr�te sur 2 vers, au prix d'une licence po�tique, puisque �hier� doit se prononcer en une syllabe . Notre pr�cieuse n'a pas l'insulte m�diocre: �dr�le�, comme s'il s'agissait d'un roturier, alors qu'elle-m�me, par son p�re, est en fait d�class�e, �fat� car c'est quelqu'un assez imbu de lui-m�me, infatu� de sa personne - il n'est pas le seul, cf. m�me dans votre classe, suivez mon regard.

Comique d'entr�e, d�embl�e, puisque l'intimit� g�n�r�e entre les deux personnages est due aux g�teaux dont Cyrano, � la sc�ne pr�c�dente, vient de charger la du�gne: celle-ci se retire non par discr�tion en fait, mais pour manger sa ration � l'ext�rieur.

Comiques aussi les anachronismes. Nous avons �voqu� les miasmes de Paris. N'est-ce pas plut�t les vacances scolaires d'�t� qui am�ne les enfants � Bergerac? De m�me, la comparaison entre les ma�s et les cheveux blonds. Le ma�s est commun dans le Sud-Ouest, mais pas au XVII�me d�butant... Il fait tr�s couleur locale, puisqu'il sert � gaver les oies�

le rapprochement entre la main (physique) et la l�vre - cens�e parler - ne manque pas d'esprit, puisque Roxane inverse totalement ici le r�le respectif de chacun des deux hommes dans la pi�ce...

etc.

Toutes les didascalies nous rendent sensibles � la com�die des personnages : chacun poursuit son but, ses propres d�sirs, malgr� la complicit� de l�enfance�

OSZAR »